personnes âgées. C’est en discutant avec les médecins, les ergothéra-
peutes et l’entourage des patients que nous définissons les services
que doit rendre le robot. Toutes ces personnes, qui savent ce qu’est la
vie quotidienne avec une personne âgée, voient très bien comment le
robot peut les aider dans leur quotidien, pour partager le travail entre
la machine et eux, garder pour eux la partie intéressante du travail
et confier au robot les parties plus pénibles, comme la répétition, les
choses pas toujours très valorisantes pour les aidants, les soignants, les
infirmiers. Bien sûr, certaines personnes sont inquiètes a priori quand
on leur parle de robots, car elles voient une menace pour leur emploi.
Mais, généralement, quand elles voient les robots en action, d’une
part elles constatent que le niveau de la technologie est encore loin
de pouvoir menacer leurs compétences et, d’autre part elles imaginent
elles-mêmes les tâches dont elles pourraient se soulager grâce au robot.
En intégrant, au plus tôt, les personnes âgées et leur entourage, on amé-
liore l’acceptabilité du robot et la pertinence des services qu’il rendra.
Par exemple, un responsable d’Europ Assistance est venu nous voir
quand nous montions le projet collaboratif Romeo2 qui associe dix-huit
partenaires pour développer l’assistance robotisée grâce à un finan-
cement de la BPI. Il nous a expliqué que les colliers médaillons dont ils
équipent leurs assurés pour qu’ils puissent contacter une assistance en
cas de besoin ne sont pas toujours portés ou qu’ils déclenchent parfois
de fausses alertes. Si le robot pouvait être un complément pour véri-
fier que la personne porte son collier ou bien vérifier qu’elle n’est pas
tombée alors que le collier a cru détecter une chute, cela leur serait très
utile. D’autres mutuelles nous ont confirmé ce besoin.
Tout cela confirme bien qu’un robot qui n’était pas fait spécifiquement
pour les personnes âgées est utilisablemême par et pour des personnes
âgées aujourd’hui. Quand nous, nous serons âgés, nous adorerons
utiliser des tablettes, des robots, etc. Mais dès aujourd’hui, quand une
personne de quatre-vingts ans voit Nao et trouve ça amusant, c’est une
victoire pour nous. Cela signifie que nous avons réussi à faire disparaître
la technologie sous une forme d’un objet amusant avec lequel on a du
plaisir à partager son environnement. Et si, sous cette apparence plai-
sante, se cache un objet qui en plus peut rendre des services, le succès
de la robotique sera complet.
Rodolphe Gelin
Directeur de la recherche Aldebaran Robotics
Je vais sans doute vous faire un petit peu moins rêver que les interve-
nants précédents, parce qu’en tant que régulateur et financeur en lien
avec les collectivités territoriales, les conseils généraux, sur le sujet des
personnes âgées et en particulier celles en perte d’autonomie ou en
risque de perte d’autonomie, nous avons des préoccupations qui sont à
la fois de regarder comment utiliser les technologies, mais aussi, il faut
bien le dire, des préoccupations sociales et économiques.
Il faut regarder
comment rassembler les deux regards. Ce que les usagers recherchent,
c’est d’élargir leurs possibilités de rester à leur domicile le plus long-
temps possible et également, à l’intérieur de ce domicile, de continuer à
disposer de communication et d’interaction avec le reste de la société.
Telles sont les préoccupations des usagers et de leurs proches. Quelles
sont les préoccupations, au regard des gérontotechnologies, des ins-
titutions : c’est de constater que nous sommes confrontés à un défi
considérable, nous l’avons évoqué, avec les évolutions démographiques
qui sont manifestement dans une augmentation forte des besoins dans
les quinze à vingt ans à venir, mais pas dans une augmentation forte
des moyens dont nous disposons.
Il n’y a pas de réduction des moyens.
Je profite de cette occasion pour dire que, contrairement à ce qui est dit
parfois, la France ne réduit pas les ressources qu’elle consacre à la santé
et au maintien de l’autonomie, simplement ces moyens ne vont pas
évoluer à la hausse comme ils l’ont fait dans le passé. Or, dans le même
temps, les besoins augmentent. Il y a troismille personnes dépendantes
supplémentaires chaque année en Île-de-France, et cela va continuer
à augmenter chaque année de la sorte. C’est beaucoup moins que le
nombre de personnes très âgées, parce que l’espérance de vie sans
incapacité progresse, mais c’est trois mille personnes de plus. Et, il faut
le dire très clairement, nous n’avons pas la possibilité de créer trois mille
places nouvelles par an.
L’enjeu est de voir comment ces gérontotechnologies peuvent per-
mettre de retarder l’entrée dans une institution de type EHPAD et
aussi de réduire les durées d’hospitalisation. Ces hospitalisations très
fréquemment entraînent qualitativement des pertes d’autonomie et
des décompensations chez les personnes tout en générant des coûts
très considérables pour la collectivité.
Ces nouvelles technologies,
qu’il s’agisse de domotique, des équipements qui permettent une
suppléance physique (aider à faire des gestes) ou une suppléance psy-
chique (maintenir des capacités cognitives des personnes qui sont no-
tamment atteintes de la maladie d’Alzheimer), ou qu’il s’agisse d’outils
qui permettent demaintenir la communication, toutes ces technologies
sont de nature à permettre à la fois un gain qualitatif et de générer des
économies très substantielles.
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