Cette intervention s’appuie sur l’expérience acquise par le Département
en matière d’ouverture des données publiques, initiée dans les Hauts-
de-Seine dès 2012, mais également sur les réflexions menées sur ce
sujet par des experts et penseurs de l’Open Data, tels Simon Chignard
ou Samuel Goëta. Il s’agit d’identifier en quoi l’Open Data se réfère aux
notions de biens publics et biens communsmais également quelles sont
les spécificités et les questions que posent les données ouvertes au
regard de ces deux notions.
L’Open Data et la politique départementale
L’Open Data, ou l’ouverture des données publiques, consiste en la mise
à disposition de données issues des administrations publiques. Les
données doivent être mises à disposition sous formats bruts, ouverts
et interopérables afin de favoriser leur réutilisation. L’Open Data répond
ainsi à un souhait d’améliorer la transparence de l’action publique
envers le citoyen. On en attend des bénéfices démocratiques.
Il doit également permettre la création de valeur économique, par le
développement de nouvelles activités à partir des données ouvertes.
Des acteurs privés peuvent transformer la donnée brute en une infor-
mation, permettant d’offrir un service aux citoyens. Par exemple, la
publication des horaires de trains, métros, tramways en Open Data doit
permettre le développement d’applications de recherches d’itinéraires
et d’horaires par d’autres acteurs que les opérateurs de transport.
L’hypothèse fondatrice en lamatière, rappelée dans un récent article par
Lionel Maurel, blogueur reconnu dont la réflexion porte notamment sur
la ré-interrogation du droit d’auteur à l’ère numérique
28
, «
qu’à l’instar
de ce qui s’est passé pour le logiciel libre, lorsque les ressources sont
ouvertes et librement réutilisables, la collaboration l’emporte sur la com-
pétition, et une valeur réelle est à nouveau produite par les entreprises,
à partir de la fourniture de services
»
29
.
Enfin, l’Open Data répond également à un enjeu de modernisation des
administrations, dans le rapport qu’elles entretiennent avec la donnée,
son partage entre administrations et son usage.
Revenons rapidement sur les origines de l’Open Data en France et
dans le monde. En France, dès la Déclaration des droits de l’Homme et
du Citoyen, l’article 15 précise que «
la société a le droit de demander
compte à tout agent public de son administration
» ; la loi CADA de 1978
garantit un accès à ces données et précise les conditions d’exercice de
ce droit, tandis que dans le monde, l’initiative du gouvernement
nouvellement élu de Barack Obama en 2008 de favoriser l’«
open
government
» dont l’OpenData est un pilier, initie le véritable lancement
du mouvement d’ouverture des données publiques.
Dans les Hauts-de-Seine, le Département a mis en ligne des données
dès janvier 2013, un an après l’impulsion du projet par le président du
Conseil départemental. Dès l’origine, la plateforme Open Data départe-
mentale a répondu à un triple objectif :
• garantir la qualité des données publiées et favoriser la réutilisation des
données en associant une riche documentation à chaque donnée (les
métadonnées), en assurant la publication des données dans de mul-
tiples formats ouverts, en offrant une première datavisualisation par
défaut de chaque donnée publiée (sous forme de carte ou graphique) ;
• permettreune fonction collaborativeet d’échanges avec les internautes
par le biais d’une rubrique de commentaires ;
• contribuer au développement territorial en accueillant les données
de partenaires des Hauts-de-Seine, telle actuellement l’université de
Nanterre et prochainement la Chambre des métiers et de l’artisanat
des Hauts-de-Seine.
I - Les données publiées et leur rapport avec la
thématique des biens publics et biens communs
Open Data et biens publics
Les données publiées auxquelles on s’intéresse ici sont donc des données
produites par des acteurs publics.
• Une fois publiées, leur usage par un acteur n’a aucun effet sur la
disponibilité pour d’autres acteurs. C’est ce que l’on dénomme une
caractéristique de
non-rivalité
.
• Par ailleurs, une fois publiées, tous les acteurs peuvent bénéficier de
ces données et les utiliser. C’est ce que l’on dénomme le caractère de
non-exclusion
.
Ces deux caractéristiques fondatrices des biens publics assimilent ainsi
les données de l’Open Data à des biens publics.
32
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(28) Lionel Maurel, juriste, conservateur à la BDIC de Nanterre-Bibliothèque docu-
mentation Internationale Contemporaine, est par ailleurs chef de projet Open Data
à l’université de Nanterre et notre interlocuteur dans le cadre du partenariat OD.
(29)
In Sous le signe de l’ouverture et des communs
, tribune parue dans
Libération
,
27 septembre 2015.