Entretien EAK - Cahier 38

46 Synthèse prospective Carine Dartiguepeyrou 47 Les trois exposés qui ont éclairé cet Entretien Albert-Kahn n°38 ont créé une harmonie narrative. On ne pouvait pas imaginer plus complet et complémentaire comme éclairage à cette question de l’avenir de la démocratie. Peut-être aussi parce que de ces trois personnalités émane une forme de sagesse politique. Le récit rétrospectif de la notion de démocratie par Pierre Rosanvallon nous a permis de ressentir l’incomplétude même de cette notion. C’est comme si la démocratie était en mouvement, que la recherche d’égalité de droits et de représentations, avait toujours été en débat et que cette dynamique aspirationnelle constituait sa singularité. C’est aussi vrai pour les totalitarismes en Europe et les populismes qui sont intimement liés à l’histoire politique de la démocratie, selon Pierre Rosanvallon. Il convient selon lui de prendre en compte les évolutions de nos sociétés, à commencer par la fin des sociétés de classes, le passage à « des communautés de situations et non pas simplement des communautés de conditions ». Cette division explique en partie la crise que nous connaissons à l’heure actuelle car les gens - on pense bien sûr aux Gilets jaunes - expriment le besoin d’être reconnus. Pierre Rosanvallon propose trois types de piste pour progresser en démocratie. Tout d’abord, favoriser le développement de ce qu’il appelle « la représentation narrative, qui consiste à rendre justice à ce que vivent tous les citoyens, à rendre leurs difficultés présentes dans le débat public ». Ensuite, en matière de « démocratie permanente, s’intéresser à l’œil du peuple et pas uniquement à la voix ». Enfin, démultiplier la démocratie. Jo Spiegel prolonge l’analyse de la crise de la représentation, celle de l’abstentionet dupopulisme car, pour lui, laquestionn’est pasuniquement de « démocratiser » la démocratie mais de chercher à « l’humaniser ». Il propose trois pistes : donner de la place au commun, offrir un cadre qui trace des limites et dépasser les egos et les individualismes. Pour cela, Jo Spiegel s’appuie sur son expérience de maire depuis vingt-cinq ans et propose une « démocratie-construction » qui soit inclusive, prenne en compte l’autre dans sa différence, s’inscrive dans le temps et soit exigeante vis-à-vis de l’objectif de faire avec et non pas uniquement pour les habitants. Il a éprouvé cinq principes qui ont permis de renouveler la pratique démocratique dans sa commune. Tout d’abord, de pratiquer davantage la démocratie tout au long du mandat et pas uniquement au moment

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