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Aujourd’hui dans les EDAS et dans les Espaces Insertion, le Département

travaille sous forme de projet d’accompagnement formalisé, demanière

écrite ou non, avec une durée définie dans le temps. Après avoir établi un

diagnostic partagé de la situation, des objectifs sont fixés. Idéalement,

des temps de bilan doivent être organisés pour échanger sur l’atteinte

ou non de ces objectifs et des éventuelles difficultés rencontrées. Pour

une même personne, il est acquis dans les consciences et les pratiques

qu’il est possible d’ouvrir plusieurs projets successivement. Toutefois,

comment ne pas se contenter de résoudre une difficulté ponctuelle

et parvenir à l’objectif d’autonomisation/d’encapacité (

empowerment)

plus global sur le long terme qui permet aux personnes de redevenir

actrices de leurs parcours et de trouver leurs propres ressources en

parvenant à élargir leur réseau ?

Nous consacrons une part importante de ce

Cahier des Entretiens

Albert-Kahn

au cadre conceptuel du changement sociétal car l’action

sociale est à la croisée de plusieurs champs, psychologiques, sociocul-

turels, sociologiques, cognitifs, économiques, etc. Ce qui nous intéresse

ici plus particulièrement est de mieux comprendre comment l’économie

du partage, et plus particulièrement la consommation collaborative,

peut permettre de répondre à des besoins concrets exprimés par les

usagers des services sociaux tout enmodifiant leur rapport à l’argent et

à la consommation, en les repositionnant dans une logique de partage,

de lien social, et dans un souci de réduire le gaspillage des ressources.

Nous donnons également beaucoup de place à la parole des usagers

et des travailleurs sociaux. Les verbatims permettront de restituer les

propos des intéressés.

Ce

Cahier

est avant tout destiné aux collaborateurs du pôle Solidarités,

mais les enseignements que l’on peut en retirer dépassent largement

ce cadre et touchent toutes les personnes, élus ou administratifs qui

œuvrent au quotidien auprès des Alto-Séquanais, voiremême peut-être

au-delà du Département.

Nous avons mobilisé l’ensemble de ces apports théoriques dans le

cadre d’une expérimentation qui s’est déroulée sur six mois (octobre

2015-mars 2016) après un cadrage de juillet à septembre 2015 et

au cours de laquelle nous avons exploré deux champs : celui du travail

social et celui de l’économie collaborative. Nous avons d’abord élaboré

une grille d’entretien dont l’objectif était double : d’une part d’évaluer

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en quoi ce type de questionnements pouvait aider la personne à mieux

faire émerger ses besoins, ses valeurs, les choses importantes pour elle

qui pourraient servir de levier à son

empowerment

. D’autre part, nous

voulions mesurer en quoi cette grille pouvait aider le travailleur social

à mieux comprendre la personne accompagnée dans sa globalité, au

travers de ses besoins exprimés, mais aussi de son rapport à différents

aspects du quotidien : sa place dans la société, son rapport aux autres, à

l’environnement, à l’argent, à la consommation, aux loisirs… Nous souhai-

tions changer le regard porté sur la personne, ne plus la considérer que

comme un usager du service social, mais bien en tant qu’individu à part

entière et en mesurer les effets.

Ensuitenous avons cherchéà améliorer notre connaissancede l’économie

du partage au travers de ses différents secteurs d’activités et moda-

lités de fonctionnement. Nous avons rédigé un

Guide des initiatives

collaboratives au service du travail social

qui recense 600 initiatives,

nationales comme locales. Ceci n’est qu’une première étape et le travail

devra être mis à jour au fil du temps. Il a néanmoins permis de mieux en

mesurer tout le potentiel mais aussi les limites. Nous avons également

réinterrogé nos territoires d’intervention pour identifier les dynamiques

à l’œuvre. Chaque fois que cela a émergé au cours des entretiens réalisés,

nous avons accompagné les personnes vers des structures relevant

de l’économie du partage (ressourceries, espaces de

co-working

, cafés

associatifs) pour recueillir leur opinions sur celles-ci et savoir si elles

pouvaient répondre à leurs besoins, qu’ils soient sociaux, matériels ou

professionnels.

Ce

Cahier

présente quelques théories et concepts afin d’expliciter

les causes de ces évolutions ou d’en décrire les émergences : les

dispositifs collaboratifs, en particulier ceux pouvant servir le travail

social, «

empowerment

» et « capacité », grille d’analyse des besoins et

des valeurs des personnes.

Dans un premier temps, nous présenterons ce qui caractérise l‘évolution

de notre société de consommation avec l’émergence de la consommation

dite collaborative et ce que cela implique en termes d’évolution des

usages et donc de la prise en compte des usagers de nos services.

Dans un second temps, nous aborderons les apports théoriques qui ont

nourri le questionnaire et l’entretien avec les usagers et peuvent éclairer

l’action sociale.