la consommation de masse, loin de satisfaire les besoins, attise plutôt
les insatisfactions.
Nous livrons ici l’exemple de Madame V. qui est un cas assez banal des
EDAS et illustre la faible marge de manœuvre une fois la gestion du
budget maîtrisée.
Initialement Madame V. est mariée et à deux enfants. Les deux
membres du couple travaillent, elle est fonctionnaire de catégorie C,
lui est de profession libérale dans le domaine médical. Leur niveau
de ressources leur permet de vivre un train de vie « confortable »,
c’est du moins ainsi qu’elle le décrit. Les difficultés de couple s’ins-
tallent et ils décident de divorcer. Ils laissent le choix aux enfants de
décider avec qui ils souhaitent vivre. La fille décide de rester vivre
chez son père, le fils de vivre avec sa mère. Madame V. doit faire
face à son quotidien et à celui de son fils avec son seul salaire, qui
s’élève à 1 500 euros. Pour aménager un nouveau logement elle a
contracté deux crédits à la consommation. En difficulté financière,
Madame V. demande clairement à être aidée à : trouver une organi-
sation budgétaire (chose qu’elle n’avait pas fait auparavant car elle
n’en avait pas la nécessité), et traiter sa situation d’endettement.
Avec Madame V nous constituerons un dossier de surendettement,
nous renégocierons certains contrats, d’assurance et de téléphone
notamment, nous en résilierons d’autres, pour réduire ses charges,
nous trouverons des outils de gestion qui lui permettent d’avoir
une lisibilité sur son solde. Pourtant, malgré ce travail, Madame V.
doit toujours faire face avec un budget particulièrement contraint.
Une fois toutes ses charges payées, il lui reste au mieux 450 euros
pour vivre, elle et son fils. Si elle parvient àmaintenir ses efforts, ils
se font au prix de renoncements et de frustrations quotidiens qui
ont eu un impact sur sa vie sociale. Même si elle est très entourée
et peut compter sur un réseau aidant, elle a malgré elle réduit ses
invitations, ses sorties, toutes les activités et à tendance à se
replier sur elle-même.
Dans ce contexte de contraintes exacerbées, quel rôle peut jouer la
consommation collaborative ? Peut-elle élargir le dispositif d’aide des
travailleurs sociaux ?
La consommation collaborative
La notion de « consommation collaborative » désigne un modèle
économique où l’usage prédomine sur la propriété : l’usage d‘un bien,
service, privilège, peut être augmenté par le partage, l’échange, le troc,
la vente ou la location de celui-ci (Wikipédia). En quelques années, le
foisonnement des plateformes d’échanges de biens, de services, de
conseils, de savoirs et l’élaboration d’initiatives ont fleuri, pour recouvrir
aujourd’hui tous les domaines de la vie. Si la liste de nouvelles start-ups
s’enrichie chaque semaine, les exemples les plus connus en France sont
Leboncoin (vente en ligne entre particuliers), BlaBlaCar (ex Covoiturage)
ou encore Airbnb (location chez l’habitant).
Concept encore émergent au début des années 2000, ce terme a été
decrypté par R. Botsman et R. Rogers dans
What mine is yours. How
collaborative consumption is changing the way we live
, publié en
2009. Selon les auteurs, cette économie repose sur : «
La croissance
exponentielle des formes de revente, de location, de partage, de troc,
d’échange, permises par les nouvelles technologies, et notamment les
technologies de “peer-to-peer”, au point d’optimiser l’utilisation des
objets mais aussi les services et les compétences de chacun
».
Le terme«consommationcollaborative»apparaît enFranceen2010dans
le livre d’Anne-Sophie Novel et Stéphane Riot,
Vive la co-révolution
. L’idée
sous-jacente de cette tendance est la mutualisation en réseau des
ressources possédées par chacun. Ainsi, la consommation collaborative
repose sur trois piliers : l’usage qui prévaut sur la propriété individuelle ;
une large communauté d’usagers et la facilité de mise en relation qui
contribuent au développement ou à la création de lien social ; la dimension
écologiquepermiseparl’optimisationdesbiensetdesservices,leréemploi,
la réutilisation.
La dimension communautaire est importante, elle crédibilise, rassure,
favorise la confiance. Lenumériquepermet d’élargir demanièrebeaucoup
plus grande le cercle d’échange. La simplicité d’utilisation est également
un facteur clé de bon fonctionnement. La géolocalisation permet le
recoupement par proximité géographique.
Plusieurs typologies existent dont celle que nous avions proposée dans
le
Cahier des Entretiens Albert-Kahn
« L’économie collaborative au service
des territoires ». On trouve dans l’économie collaborative des biens et
des services échangés à l’échelle nationale, d’autres à une échelle
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