Previous Page  14-15 / 96 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 14-15 / 96 Next Page
Page Background

12

13

La société de consommation

La « société de consommation » apparaît pour la première fois dans

les années 1920. Cette société de la consommation est partie intrin-

sèque du développement des sociétés occidentales depuis le siècle

dernier. Pour Gilles Lipovetsky la société de consommation a évolué

en trois cycles principaux : la naissance des marchés de masse, puis la

consommation de masse, et enfin l’hyperconsommation. Elle accorde

aux pratiques de consommation une importance fondatrice de sens,

de la valeur et de la finalité de l’existence de ses membres. Selon Jean

Baudrillard

1

, elle désigne une civilisation qui fonde son économie non

plus sur la production du nécessaire, mais sur la production du superflu.

La consommation est devenue non plus une nécessité, mais unmode de

vie, de comportement et de culture.

Pour stimuler l’hyperconsommation, les acteurs de l’offre ne cherchent

plus seulement à produire des articles, ils renouvellent plus vite les

modèles, les démodent en proposant des versions plus performantes ou

légèrement différentes. Il s’agit de séduire par la nouveauté, d’accélérer

les lancements de produits, de réduire les délais de conception et de

mise sur lemarché des produits nouveaux pour tenir les consommateurs

en haleine.

«

Le constat est banal : au fur et à mesure que nos sociétés

s’enrichissent, surgissent sans cesse de nouvelles envies

de consommer. Plus on consomme, plus on veut consommer :

l’époque de l’abondance est inséparable d’un élargissement indéfini

de la sphère des satisfactions désirées et d’une incapacité à résorber

les appétits de consommation, toute saturation d’un besoin

s’accompagnant aussitôt d’une nouvelle demande.

2

»

Gilles Lipovestky

Avant lui des théoriciens avaient montré que la consommation constitue

un fait social. Consommer, ne serait pas seulement dépenser, acquérir

des biens matériels, ce serait bel et bien prendre part à la vie sociale.

Dans cette logique, être exclu de la consommation, c’est être exclu de

la société. Aussi, si l’on veut conserver son appartenance à un groupe,

il faut se conformer et imiter ses semblables. On comprend mieux

aujourd’hui pourquoi pour certaines personnes, avoir un iPhone, une

paire de tennis Nike ou une sacoche Lacoste ou LVMH constituent un

élément d’appartenance sociale à leurs yeux. Ces valeurs sont repré-

sentatives de la modernité.

D’autres théoriciens ont montré que les possessions peuvent jouer un

rôle déterminant dans la construction identitaire des individus, dans la

mesure où ils s’investissent psychologiquement dans leurs possessions,

ou du moins pour certaines d’entre elles.

Dans une société d’abondance comme la nôtre, les achats plaisirs

prennent souvent le pas sur les achats de nécessité. C’est l’approche

hédonique. Plus les liens sociaux sont fragiles, plus le consumérisme

fait rage comme évasion, refuge, palliant la solitude et le sentiment

d’incomplétude. Rien n’illustre mieux la dimension hédonique que le

rôle croissant des loisirs. L’important n’est plus tant ici d’accumuler des

choses, mais d’intensifier le présent.

Plus récemment, les chercheurs comme Tim Jackson montrent que le

consumérisme constitueunedépendanceen tant que telle, qu’il entretient

l’absence de sens et contribuemême à accentuer les angoisses existen-

tielles. Ce type de développement à enraciner une névrose collective

qui fait qu’une prise de conscience et thérapie semblent indispensables

pour en sortir

3

.

Pauvreté, surendettement et gestion des

contraintes

Pauvreté

Fin 2013, l’Insee annonçait une nouvelle hausse du taux de pauvreté

monétaire en France, établissant le nombre de personnes vivant sous

le seuil de pauvreté à 14,3 % de la population. Depuis une dizaine

d’années, la pauvreté augmente en France et touche de nouvelles

catégories de population.

(1) Jean Baudrillard,

La société de consommation, ses mythes, ses structures

,

Paris, Gallimard, Collection Folio/essais, 1986.

(2) Gilles Lipovetsky,

Le bonheur paradoxal. Essai sur la société d’hyperconsom-

mation

, Paris, Gallimard, Collection Folio/essais 2009, p 40.

(3) Tim Jackson, « L’âge de fer du consumérisme »

in

Dominique Bourg, Carine

Dartiguepeyrou, Caroline Gervais, Olivier Perrin,

Les nouveaux modes de vie

durables : s’engager autrement

, Éditions Le Bord de l’Eau, 2016.