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Pratiques métrologiques et société

Des travaux de recherche auxquels j'ai participé vont plus loin. Ils

montrent que l'exercice de la démocratie sociale et sanitaire directe

par la co-construction de dispositifs d'évaluation participatifs a des

effets positifs sur le bien-être individuel et collectif. Ces dispositifs où

les parties prenantes co-produisent des solutions semblent améliorer

la santé morale et physique des participants et renvoient une image

positive aux acteurs professionnels et bénévoles de terrain. Cette

transformation de point de vue montre le passage culturel d'une vision

de l'action sociale et de l'aide à la personne «

top/bottom

» à une réalité

partagée de reconnaissance mutuelle, de «

care

», d'«

empowerment

»,

d'«

affordance

», de potentiel individuel et collectif, de valeurs com-

munes et de citoyenneté.

Ci-dessous quatre exemples concrets illustrant cette inversion des rôles

des acteurs.

Parmi les très nombreux travaux où les mesures d'impact, la qualité des

données, la prise en compte du subjectif et celle de nouvelles valeurs

sociales sont interrogées, prenons quelques exemples pour fixer les

idées. Une étude

Connaître les besoins des aidants

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à laquelle j'ai

participée a eu lieu dans le Finistère en 2013. Il s'agissait de valoriser

l'auto-évaluation et la prise de conscience de ses besoins par les aidants

eux-mêmes. Et ensuite, de participer directement

avec

les acteurs

professionnels et bénévoles à la recherche de solutions innovantes

pour améliorer leur quotidien, parfois trop lourd à porter. Cette étude

a montré une mobilisation inhabituelle des aidants et des acteurs de

terrain. La reconnaissance mutuelle autour d'un projet commun procure

un sentiment de confiance, de sécurité et de bien-être.

Autre exemple, en 2014, AG2R

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initie un projet d'action sociale dans

le département du Tarn. Lors de la restitution des travaux,

La Parole

est aux aidants

, les acteurs professionnels, les bénévoles et les aidants

familiaux qui ont participé à cette action expriment un changement de

regard sur soi et sur l'autre.

Jeparticipeactuellement àune formationenWallonie. «

Limites, repères et

mesure : des outils essentiels pour préserver le bien-être des profession-

nels, des bénévoles et des aidants proches

». Lamesure y est centrale, à

la fois personnelle et collective, et repose sur une culture métrologique

de l'accord et du partage, de la rigueur et de l'incertitude.

La démarche des

Living Labs

où les participants sont invités à être d'une

certainemanièredesassistantsderechercheenR&Dvadansunmêmesens.

Conclusion

Admettons que des modes opératoires de métrologie sont transpo-

sables au ressenti et au subjectif, et permettent de se mettre d'accord

sur ce qu'est un résultat demesure fiable. Pour ce faire, un préalable est

indispensable : acquérir auparavant quelques règles fondamentales de

culture de base et de principes de mesure. L'accord prime. Une mesure

ne se prend pas, elle se donne. L'opérateur de mesure, quelle que soit

la nature de ce qu'il mesure, est rigoureux, honnête, attentif, minutieux,

méthodique, patient. Il utilise des méthodes et procédés traçables et

reproductibles. Il vérifie sa mesure, plusieurs fois si nécessaire. Il évalue

une incertitude qu'il ajoute à ses résultats.

L'opérateur de mesure définit précisément, avec ses collaborateurs,

ce que l'on cherche à mesurer => mesurande. Comment aboutir aux

résultats de mesure ? => Analyse du processus de mesure. Quelle

confiance dans les résultats obtenus ? => incertitude de mesure / répé-

tabilité. Mesurer, c'est valoriser. C'est prévoir, gérer, analyser, maîtriser

des processus. C'est comprendre ses besoins demesure pour assurer un

service. C'est rendre compte d'un bienfait de santé publique suite à une

campagne de prévention. C'est aussi donner à voir des effets positifs

d'une participation citoyenne au développement d'une démocratie

sociale et sanitaire.

Pour l'usage scientifique, mesurer autorise l'échange d'informations

significatives, la vérification d'expériences faites ailleurs et à confirmer

ou infirmer des théories.

Enfin, la mesure définit un chemin de vérité, au sens de «

maât

», et

construit celui de la lucidité.

Marie-Ange Cotteret

Chercheuse en sciences humaines

spécialiste de la question de la mesure

16

17

(13)

mairie-relecq-kerhuon.fr/medias/13/1380802262.pdf

(14)

http://www.ag2rlamondiale.fr/groupe/qui-sommes-nous/solidarite-fondation-

lamondiale-isica