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Ils ont tendance à estimer que leur manière de voir est la « bonne », que

c’est bien la réalité. Ils ne prennent pas le temps d’écouter les autres ou

de se mettre à leur place pour voir différemment la situation et élargir

leur vision restreinte.

Lorsque les autres décident tout de même d’exprimer leur point de vue,

il est intéressant de constater que le troisième réflexe mental se met

en marche : les cadres passent plus de temps à justifier et à défendre

leur point de vue qu’à écouter celui des autres. En fait, l’apport

de perspectives nouvelles est inconsciemment considéré comme une

atteinte à l’autorité. Le cadre a l’impression que s’il existe deuxmanières

différentes d’interpréter une situation, c’est que l’une d’entre elles est

forcément fausse. Ne voulant pas être pris en porte-à-faux, le cadre

cherche à démontrer que son point de vue est le « bon », le « juste »,

le « vrai ». Or, tout cela n’est que pure illusion. Il n’existe pas de réa-

lité sociale objective, il n’existe que des constructions subjectives

de la réalité.

Ce constat doit forcer les cadres à être humbles. Les autres peuvent leur

apprendre quelque chose sur la situation, et sur eux-mêmes par lamême

occasion. C’est un élément stratégique majeur dans un jeu politique : si

les individus ne répondent qu’aux représentations mentales qu’ils se

font de la situation, vous ne pouvez anticiper leurs comportements que

si vous mettez leurs lunettes pour regarder la situation.

Le quatrième réflexe mental concerne ceux qui font preuve d’empathie

et qui écoutent les points de vue des autres. L’erreur consiste à vouloir

à tout prix arriver à un consensus sur la

vision

que l’on a d’une situation.

Si vous souhaitez mettre tout le monde d’accord sur la vision d’une

situation, vous n’allez conserver comme éléments d’analyse que le plus

petit dénominateur commun. Vous réduisez donc considérablement la

vision de la situation. On peut rechercher un consensus sur une

solution

qui réponde le mieux possible à l’ensemble des points de vue mais il est

inutile, voire dangereusement réducteur, de rechercher un consensus

sur l’interprétation et la

vision

d’une situation.

Il faut retenir de ces recherches trois éléments essentiels pour l’intelli-

gence situationnelle : (1) avoir pris le temps de connaître chaque

individu avant le jeu politique, (2) écouter attentivement la manière

dont les autres perçoivent la situation et (3) lorsqu’on écoute le point

de vue des autres, la question à se poser n’est pas : « Son point de vue

est-il juste ? » mais « Pourquoi voit-il la situation de cette manière ? ».

L’intelligence situationnelle demande ainsi de développer une vraie

curiosité pour l’Autre afin d’échapper à ces réflexes mentaux.

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