un monde de service où la matière grise abonde, il semble nécessaire
et pertinent de capitaliser sur les intelligences individuelles pour
transcender, avec le support des technologies et habitudes sociales
diverses, ces individualités afin d’en retirer un optimum global qui
respecte néanmoins les spécificités propres à chacun. Pour parfaire la
capacité du groupe à bénéficier des apports de tous les salariés, l’entre-
prise a adopté de façon massive la logique du réseau social d’entreprise
pour développer ce que l’on appellera des communautés digitales. Ce
fonctionnement s’est rapidement imposé comme une évidence tant il
est en phase avec les modes d’interactions usuels qui se sont répandus
dans le monde. La solution « bluekiwi », développée par une société
française que le groupe Atos a achetée il y a deux ans, a été déployée
auprès des 85 000 collaborateurs de l’entreprise et a permis de voir
éclore et foisonner des « communautés bluekiwi ». Ces communautés
actives au nombre de 7 000 au planmondial et 900 pour la France (dont
700 espaces projets/clients fermés et 200 communautés de partage
ouvertes) sont autant de lieux d’expression, d’échange, de partage,
de création : le principe de l’agora athénienne où chacun, en sa qualité
de salarié, dispose d’une plateforme d’expression libre, dans le respect
des règles internes et d’éthique sociale (héritage là aussi des principes
régissant les lieux de vie antiques).
Les communautés répondent à des logiques multiples :
- logique de projets ou de programmes : communautés qui réunissent
pour des durées variables l’ensemble des acteurs réunis autour d’un
programme ou d’un projet… ces communautés, nombreuses, per-
mettent le dialogue, la prise de connaissance, l’information et plus
généralement le débat sur des idées, postulats ou principes mis en
avant dans le cadre du projet, et ce indépendamment de toute logique
hiérarchique.
C’est la valeur de la contribution (le « post ») qui prime et non néces-
sairement la qualité de l’émetteur ;
- logique organisationnelle : communautés qui réunissent les équipes
appartenant à une même filière organisationnelle et/ou hiérarchique.
Là aussi la communauté est un vecteur d’information et de proposition ;
sorte d’agora moderne où l’échange et le débat trouvent naturellement
leurs places et où les contributions de tous participent à l’avancée des
idées.
Là aussi, la valeur du post prend le pas sur l’identité de l’émetteur et
sur son rang dans l’organisation ;
- logique des centres d’intérêt : communautés qui réunissent des salariés
ayant des centres d’intérêt ou des passions (professionnelles ou
personnelles) communes, etc.
Les communautés peuvent être ouvertes (donc publiques) ou fermées
(dont l’accès est géré par un
Community Leader)
; ces communautés
reposent sur une démarche de transparence et de responsabilité. Chacun
s’exprimant librement assume très constructivement ses contributions
et les réactions de la communauté dans une recherche de co-construction
de solutions par les apports de tous. On constate très vite l’émergence de
leaders d’opinion qui par leur pensée sont capables de susciter le débat,
d’interpeller les modes opératoires de proposer des disruptions.
La légitimité managériale dans ces communautés
digitales
Le réseau social et ses déclinaisonsmultiples en communautés diverses
modifient sur le fond l’approchemanagériale et sa légitimité : lemanager
n’est plus légitime du seul fait de son rang ou de son savoir. Pour les
équipes ou aux yeux des tiers c’est la capacité à dynamiser la capacité
de proposition du groupe et la propension à engager le groupe dans une
solution co-construite enmode collaboratif qui font dumanager le leader
compétent et suivi. Leglissement n’est pas seulement sémantiquequand
on évoque une transition d’une dimension managériale à une dimension
de leadership. Le premier gère le réel en optimisant les facteurs de
production, le second transforme le réel en explorant via le groupe de
nouveaux champs de développement. Les qualités humaines requises
pour s’imposer dans ce registre sont donc d’une nature différente de
celles qui étaient antérieurement admises comme nécessaires ; le leader
conserve évidemment une autorité de position ou de compétence mais
il s’impose surtout par cette capacité à stimuler la créativité, à aligner les
vecteurs dans le débat et à orienter la réflexion vers un objectif partagé.
Le leader n’est plus celui qui sait…mais celui qui fait en sorte que chacun
dans le groupe nourrisse le savoir collectif ; l’information n’est plus une
valeur à thésauriser mais bien un terreau d’où peuvent venir créations
et disruptions porteuses de valeurs nouvelles pour le collectif.
Une nouvelle temporalité
Le rapport à l’espace comme au travail en groupe étant redéfini, celui du
rapport au temps est évidemment lui aussi modifié ; la communication
peut toujours s’établir, indépendamment de la présence sur un site
unique, grâce aux outils aussi bien :
- en mode synchrone en
one on one
(via par exemple l’application
messagerie instantanée de Lync) ;
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