L’ouverture des données enrichit la culture
de la transversalité dans les administrations
Problématique récente et complexe, l’ouverture des données publiques
pose de nombreuses questions. Mais pour exploiter au mieux ses
potentialités démocratiques, les organismes publics doivent fonda-
mentalement ancrer leurs démarches dans un dialogue avec la société
civile dans ses différentes composantes. De nombreux usages sont éga-
lement à inventer autour des données ouvertes pour pouvoir en saisir
toutes les opportunités. Peu à peu, le champ se structure, bénéficie de
retours d’expériences et de « bonnes pratiques ».
Dans ce contexte, les administrations publiques prennent conscience
de l’intérêt de mieux valoriser les nombreuses données dont elles
disposent, en permettant non seulement l’accès à ces données mais
également leur réutilisation, c’est-à-dire leur exploitation par des tiers
à d’autres fins que celles pour lesquelles elles sont détenues ou ont été
élaborées.
Dans le cadre de leur mission de service public, l’État, les collectivités
locales et les opérateurs de services publics produisent, reçoivent et
agrègent un très grand nombre de données, dans demultiples domaines
et sur de multiples supports. En principe, toutes ces données sont
réutilisables, sauf exceptions telles que les données personnelles,
celles relatives au secret industriel et commercial ou celles qui relèvent
de la sécurité publique. Cette masse de données à ouvrir peut laisser
perplexe. La mauvaise fiabilité des données est également une crainte
récurrente chez les acteurs publics. Actuellement, les administrations
n’ont aucune contrainte dans ce domaine, mais l’obligation de mise à
disposition fait peser une certaine pression en termes de qualité. Il en
est de même en ce qui concerne la « fraîcheur » des données. En effet,
la demande de données mises à jour est de plus en plus grande de la
part des développeurs et les outils et applications mobiles basés sur
des données en temps réel sont de plus en plus populaires auprès des
usagers.
La mise en œuvre d’une démarche d’ouverture des données publiques
peut engendrer une charge de travail plus importante et nécessiter
de nouvelles compétences, ce qui pourra se traduire par un travail de
formation, l’embauche de nouveaux collaborateurs, le recours à des
prestataires externes. L’ouverture des données publiques s’inscrivant
dans une stratégie globale, les organismes publics doivent revoir leurs
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à adopter, le type de licence, etc. Ce comité d’éthique est composé de
cinq personnes externes au Conseil général : le directeur régional de
l’Insee, un journaliste, une magistrate, un professeur de philosophie et
un représentant de l’association de consommateurs UFCQue choisir. Si le
bilan en termes d’utilisation des outils par les citoyens est mitigé (par
manque de relais économiques et associatifs sensibles aux enjeux
de l’
Open Data
), le portail de données publiques s’avère un bon outil
pour le pilotage des politiques publiques et le contrôle de gestion de
la collectivité.
Au-delà de la compréhensibilité et de l’éducation aux données, l’appro-
priation par la pratique est également un enjeu clé pour que le grand
public s’empare des données et puisse exploiter les possibilités offertes
par l’
Open Data
. La démarche qui consiste à permettre au citoyen de
« mettre les mains dans le cambouis » des données contribue en effet
à rendre concrets des concepts abstraits en les expérimentant de façon
directe et personnelle. La data-visualisation permet donc d’effectuer un
premier travail de vulgarisation pour une meilleure compréhension des
données complexes par le grand public.
Néanmoins, si cet exercice s’avère utile et nécessaire en termes de
pédagogie et de transparence de l’information, il n’est pas suffisant pour
garantir une réelle appropriation. En effet, toute data-visualisation
correspond à une interprétation lors de la réutilisation des données
(choix de celles-ci, choix du format de visualisation, choix de la théma-
tique...) et peut donner lieu à controverse.
Le décalage entre les promesses de renforcement démocratique, de
participation et le fait que l’
Open Data
ne s’adresse pas au grand public
semble porteur d’un risque de « fracture sociétale ». C’est pourquoi
l’ouverture des données publiques ne doit pas être une fin en soi. Un
travail d’accompagnement est nécessaire afin que les citoyens puissent
comprendre mais aussi s’approprier cette évolution. Cet accompagne-
ment, cette médiation, peut être dévolu à des acteurs tiers.
Dans ce contexte, une politique de libération des données qui ne viserait
qu’à diffuser une information auprès du grand public sans lui donner les
moyens de se l’approprier de façon citoyenne, afin qu’elle devienne une
source d’encapacitation, ne peut que contribuer à alimenter ce déficit de
légitimité de l’action publique. Le nouveau fossé numérique à combler
est certainement celui-ci : faire de la donnée administrative un outil de
la participation et de la décision.
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