Cahier numéro 10 - page 24-25

totale, de ressources traditionnellement gérées par la collectivité locale,
qu’il s’agisse de jardins partagés ou de budget participatif.
Au fond, le territoire en communs implique une forme de gouvernance
participative,dontlebonfonctionnementnécessitelavolontédespouvoirs
publics, l’existence d’intérêts communs et d’une conscience collective
parmi les habitants d’un territoire, et enfin la coopération entre citoyens,
acteurs publics et acteurs privés. S’il est difficile de proposer une
définition unique d’un territoire en communs, les modèles relevant de
l’économie collaborative apportent un certain nombre d’outils au service
de la démarche.
Souvent, ces initiatives naissent d’une brèche dans l’action des collec-
tivités, conduisant une communauté citoyenne à mettre en place une
solution « par le bas », à leur initiative. Parfois, ces pratiques sont
identifiées, soutenues et amplifiées par les pouvoirs publics locaux
dans une logique de coopération avec les citoyens, offrant à ces projets
une montée en puissance.
Un premier niveau du territoire en communs est
le partage et l’utilisation
d’informations produites directement par les citoyens
. Complément
naturel des démarches
open data,
à l’initiative des pouvoirs publics,
les
données citoyennes
peuvent être agrégées au moyen d’une base
de données et d’une application mobile. OpenStreetMap permet par
exemple aux citoyens de cartographier leur territoire en données
ouvertes, et d’y adjoindre des calques spécifiant des informations locales
telles que le degré d’accessibilité aux personnes à mobilité réduite
(Wheelmap.org) ou la localisation d’arbres fruitiers (Mundraub.org). Le
SmartCitizen Kit
développé par le Fab Lab de Barcelone, est un capteur
open source
permettant aux citoyens de remonter des données envi-
ronnementales telles que la température, le bruit ou la qualité de l’air,
afin de les visualiser sur une plateforme web.
Un deuxième niveau consiste à
recourir au financement participatif
(
crowdfunding
)
pour des projets qui viendront enrichir le territoire :
commerce local, projet associatif, aménagement de l’espace public,
etc. Cela peut se faire au moyen de plateformes généralistes, qu’elles
soient basées sur le don avec contreparties (KissKissBankBank, Ulule),
sur le prêt (Hellomerci) ou encore sur la prise de participation (Anaxago,
SmartAngels). Mais au-delà de celles-ci, des plateformes spécialisées
sur les projets locaux émergent, à l’instar du français Bulb In Town
(financement des commerces de proximité) ou des plateformes anglo-
saxonnes Spacehive ouNeighborly (aménagement d’espace public). Ces
dispositifs de financement citoyen, s’ils n’ont pas vocation à remplacer
la dépense publique, peuvent constituer un levier d’action précieux
pour les collectivités, en particulier en période de restriction budgétaire
et de resserrement des crédits accordés par les banques aux petits
commerces.
Un troisième niveau consiste à
impliquer les citoyens dans la gouver-
nance même du territoire
, dans une démarche de réelle collaboration
avec les acteurs publics. Le budget participatif par exemple, permet
aux citoyens de décider de l’attribution d’une partie de l’enve-
loppe budgétaire de la collectivité, en proposant et votant pour les
projets qu’ils estiment les plus utiles aux territoires. Née à Porto Alegre
en 1989, la démarche s’est aujourd’hui propagée dans plus de 1 500
villes à travers le monde, et la ville de Paris leur emboîtera le pas dès
septembre 2015 en attribuant 5 % de son budget total (soit 70 M€)
de façon participative. Autre exemple, la co-création de politiques
publiques par l’implication des citoyens, à l’instar de la démarche portée
par le collectif francophone Démocratie Ouverte
via
sa plateforme
Parlement & Citoyens, qui facilite ce processus à l’échelon national
français, et sera bientôt décliné localement dans le cadre de son pro-
gramme Territoires Hautement Citoyens
11
.
Enfin, un quatrième niveau consiste en
l’implication citoyenne dans la
gouvernance des infrastructures territoriales
, telles que les coopéra-
tives de production d’énergie renouvelable (Enercoop), les opérateurs
télécomcoopératifs (Guifi en Catalogne, Rutland Telecomen Angleterre,
ou le village de Löwenstedt dans le Nord de l’Allemagne), la mise en
place de tiers-lieux
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, de conciergeries de quartier, de jardins partagés,
et plus généralement lamise en biens communs d’une partie de l’espace
public local
13
. Plus structurel encore, le développement de monnaies
complémentaires
14
locales et citoyennes, à l’instar de Symba, le projet
de monnaie régionale solidaire pour la région Île-de-France. Tous ces
exemples sont autant d’avancées pour mettre en place une véritable
gouvernance participative des territoires ainsi qu’un véritable regain de
la conscience de vivre ensemble.
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(11)
hautement-citoyens.html
(12) Par exemple, des bibliothèques, des espaces de
coworkings
mis à disposition
par la collectivité.
(13) Voir à ce titre les actions relayées et portées par le Réseau Francophone
autour des Biens Communs, notamment dans le cade du festival « Villes en Biens
Communs » villes.bienscommuns.org/
(14) Eusko au Pays basque, Sol Violette à Toulouse, Abeille à Villeneuve-sur-Lot,
Galléco en Ille-et-Vilaine, Symba en Île-de-France, le TEM à Athènes (Grèce), etc.
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