Cahier numéro 10 - page 28-29

Le premier type d’alliance est
le partenariat public-privé
(au sens large
du terme), c’est-à-dire la conjugaison d’une impulsion venant des pou-
voirs en place (
top-down
) assortie d’une collaboration des entreprises
et/ou des citoyens (
bottom-up
). C’est le chemin qu’a choisi Séoul, dont
le maire Park Won-soon a déclaré en 2013 vouloir créer la première
«
 sharing city
» du monde. Face aux spécificités démographiques (la
ville rassemble un tiers de la population du pays) et à la densité urbaine,
le maire a expliqué qu’une approche uniquement «
bottom-up
» serait
difficile à coordonner. D’où son choix de recourir à un mode de décision
mixte porté en particulier par un « Comité de promotion du partage »,
chargé de mettre en œuvre la politique et composé de douze membres
issus du secteur privé et de troismembres du gouvernement. Lesmesures
initiéesportentenelles aussi tout autant sur la promotion de l’innovation
(création d’un incubateur) que d’initiatives à destination des citoyens
(bibliothèques communes dans les immeubles et création d’un pro-
gramme où les jeunes peuvent aider à résoudre des problématiques à
caractère social).
Toutefois, les cas où les pouvoirs publics prennent la main (ou la
tendent) est moins courant que l’alliance entre les acteurs privés et/ou
les citoyens face aux pouvoirs publics locaux, parfois d’ailleurs dans une
démarche conflictuelle.
BayShare
, opérant dans la baie de San Fransisco, est l’exemple le plus
connu de l’alliance entre les acteurs privés pour promouvoir l’économie
du partage auprès de pouvoirs publics a minima méfiants, sinon fran-
chement hostiles (notamment face au covoiturage urbain et aux VTC).
La mission de BayShare est «
de faire de la baie de San Francisco le
premier lieu de partage de la planète
», en regroupant un réseau mixte
composé d’entreprises de l’économie du partage bien connues (par
exemple Airbnb et Lyft), mais aussi d’ONG telles que Shareable, qui
adoptent une posture plus indépendante, citoyenne et nuancée dans
leur soutien à l’économie du partage. BayShare a joué un rôle clé dans
la résolution adoptée en juin 2013 par quinze maires des États-Unis,
incluant les maires de San Fransisco et New York, où ils déclarent leur
intention de développer les territoires en partage à travers notamment
la création de
task forces
pour étudier les éventuelles adaptations de la
réglementation dans l’intérêt de tous.
BayShare est à distinguer de réseaux qui jouent un rôle plus proactif
pour encourager les pouvoirs publics à résoudre les conflits avec les
plateformes de consommation collaborative en faveur de ces derniers.
26
27
C’est ainsi que
Peers
, ONGfinancée principalement par les investisseurs
des plateformes de la consommation collaborative, et qui mobilise leurs
utilisateurs dans un fonctionnement qui rappelle les outils de pétition
citoyenne tels qu’Avaaz ou Change.org, a participé à la résolution du
conflit avec la ville de New York dans le cadre d’un contentieux engagé
par la ville contre les locations illégales sur la plateforme Airbnb
16
.
Pourtant, les mêmes plateformes savent appréhender les enjeux
sociaux et fiscaux provoqués par le caractère disruptif des plateformes
et la difficile adaptation des lois et règlements aux pratiques à l’évolu-
tion si rapide. Ainsi, le même Airbnb a passé un accord très remarqué
avec la ville de Portland aux États-Unis, dans le cadre de son programme
«
Shared City
» (ville en partage), qui vise à collecter impôts locaux et
taxes de séjour auprès de ses hôtes basés à Portland, à côté d’autres
micro-opérations à caractère social à destination des habitants.
En dépit de l’hétérogénéité des situations et types de partenariats
noués, il s’avère que la
coopération entre les pouvoirs publics et les
entreprises concernées fonctionne toujours mieux et avec moins
d’externalités négatives pour les citoyens que l’affrontement
. Aussi, la
remise à plat rapide de la réglementation des secteurs touchés par le
covoiturage urbain et le logement chez l’habitant, pour ne citer qu’eux,
apparaît indispensable au stade actuel de tension. Une posture atten-
tiste fait au contraire peser une insécurité juridique sur les usagers tout
en laissant dans le flou tout un secteur économique en forte croissance.
Conclusion : des actions concrètes pour
les territoires
L’économie collaborative offre aux territoires des idées, outils, exemples
et leviers d’action pour transformer les territoires en lieux prospères,
attractifs, créateurs de lien social et de vitalité économique, privilégiant
la diversité et encourageant l’innovation. Nombre de ces initiatives sont
soit le fait de startups privées, qui se constituent quelquefois en éco-
système, soit d’associations et de citoyens de plus en plus volontaires
et proactifs. Le projet Alternatiba a ainsi mobilisé 12 000 personnes le
6 octobre 2013 à Bayonne pour une série d’événements et conférences
(16) La plateforme a finalement accepté de retirer 2 000 offres de locations mani-
festement réalisées dans un but commercial.
1...,8-9,10-11,12-13,14-15,16-17,18-19,20-21,22-23,24-25,26-27 30-31,32-33,34-35,36-37,38-39,40-41,42-43,44-45,46-47,48-49,...64
Powered by FlippingBook