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d’un dirigeant d’entreprise ? Quels sont les atouts de notre écosystème
local et sur quelles forces pouvons-nous capitaliser pour construire une
communauté créative ? Avec quels partenaires pouvons-nous mutua-
liser ces dépenses d’investissement, ces coûts d’exploitation ? Quel
modèle économique est-il le plus adapté dans notre contexte ? Autour
de quel enjeu fédérateur pouvons-nous mobiliser les forces vives dont
nous avons besoin ? Comment animer cette dynamique au quotidien ?
Le télétravail est une piste de réponse aux inégalités territoriales
et à l’attractivité du territoire, mais qui ne saurait être suffisante. Le
tiers-lieu compris dans son acception intégrale doit porter une vision
économique, sociale et environnementale du territoire qui soit parta-
gée par l’ensemble des parties prenantes. Il n’est donc pas uniquement
un outil de développement économique au service du territoire, mais
aussi un outil d’adaptation au changement. L’enjeu du tiers-lieu n’est
pas uniquement technologique ou infrastructurel : il est profondément
humain et culturel. Il participe d’un changement nécessaire et profond
des organisations et des modes de travail via la collaboration, dans un
monde qui se digitalise de plus en plus vite et dans lequel beaucoup
d’individus et d’organisations sont en perte de repères. C’est donc aussi
un outil de transformation de l’action publique que les administrations
doivent absolument s’approprier pleinement.
Xavier de Mazenod
Fondateur du site Zevillage.net et co-fondateur
du Tour de France du télétravail et des tiers-lieux
Nathanaël Mathieu
Co-fondateur de LBMG Worklabs
et du Tour de France du télétravail et des tiers-lieux
Grégoire Epitalon
Consultant tiers-lieux - LBMG Worklabs
Références bibliographiques
Castells M. (2005),
The Network Society – from Knowledge to Policy
,
Washington, DC: Johns Hopkins Center for Transatlantic Relations
Citica(2013),
Évaluationdudispositif Cybercantal Télécentres
-année2012
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rience semblable) et à encourager les entreprises locales à utiliser les
tiers-lieux (lobbying, intéressements divers). Certains départements ont
déjà pris conscience du devoir d’exemplarité qui résulte de cette légiti-
mité : projets de tiers-lieux à usage interne, déploiement du télétravail
au sein des effectifs, adoption d’une posture d’animateur de territoire
(à l’image d’IT 77) et d’acteur structurant pour la formation de réseaux
économiques locaux...
À cette échelle territoriale plus large, comme le soulignent Fasshauer
et Garcin, la principale difficulté naît de la rencontre entre des parties
prenantes très différentes. Les conceptions que se font ces parties pre-
nantes (collectivités, entreprises, acteurs institutionnels, associations,
fédérations, etc.) de la fonction et de l’utilité du tiers-lieu divergeront
probablement dans la plupart des cas ; mais la mise en œuvre d’une
logique de politique publique orientée vers le soutien à des réseaux,
et non à un dispositif à usage unique, permet, via une collaboration
efficiente entre le territoire et ses parties prenantes, de faire converger
des positions
a priori
divergentes vers une stratégie collective fondée
sur des intérêts partagés : développement économique du territoire,
logiques de
clustering
et de mutualisation de ressources, etc.
Vers l’alignement des intérêts entre territoires
et entreprises
Le principal enjeu du tiers-lieu est la construction et le développement
d’un réseau local, d’un écosystème permettant de créer des ponts entre
des mondes qui ne communiqueraient pas sans sa présence. Nous sou-
haitions ici montrer l’intérêt que peut présenter un tiers-lieu pour une
entreprise et pour un territoire. Qu’un projet soit porté par un acteur
privé ou un acteur public, les facteurs clés de son succès sont lesmêmes
: un ancrage dans le territoire local (le quartier, la ville, le village) d’une
part, et une dynamique économique de création de valeur via la collabo-
ration et la transversalité d’autre part.
L’essentiel de tout projet de tiers-lieu est de poser les bonnes questions
et d’y apporter une réponse collective : quels usages du numérique
souhaitons-nous voir émerger sur notre territoire, et pour atteindre quel
objectif ? Comment notre projet peut-il aider les entreprises locales à
être plus agiles, plus performantes ou à réduire leurs coûts ? Dans quelle
mesure la communauté du tiers-lieu sera-t-elle enmesure de les accom-
pagner dans leur transition, de renforcer leur compétitivité ? Comment
faire de ce lieu un véritable facteur d’attractivité du territoire aux yeux